Confinement, mai 2020

Le monde est sens dessus dessous avec la menace du Covid-19. Assis entre deux cultures, la française et la suédoise, nous nous sommes auto-confinés depuis la mi-mars. La Suède n’a pris aucune mesure stricte et en appelle à la responsabilisation de chacun, mais l’école française a fermé et les cours ont lieu depuis deux mois à la maison.

Dans ce contexte, nous essayons de maintenir les activités et les soins d’Anatole. Malheureusement, nous avons dû arrêter la rééducation et les séances de piscine hebdomadaires. Nous avons préféré opter pour le confinement pour ne pas mettre en danger Anatole mais encore plus les enfants malades et immunodéficients que nous risquerions de croiser puisque nous nous rendons à l’hôpital encore régulièrement pour les différentes analyses…. ou pour la pose d’un plâtre sur une fracture du poignet, heureusement sans gravité !

Nous nous sommes plutôt bien adaptés à cette période confuse et étrange. Et puis, au fond, le confinement, la vie à quatre, en autarcie, un peu cloîtrée, disons que ça nous connait, nous en avons déjà fait l’expérience l’année dernière, lorsque nous sommes partis aux USA, nous arrachant du jour au lendemain à notre quotidien et notre routine bien huilée. Et depuis le diagnostic d’Anatole, nous sommes habitués à naviguer à vue, à l’absence de projections, à l’incapacité de savoir ce que nos lendemains nous réservent, au point d’interrogation en guise de futur. Alors nous prenons la vie au jour le jour, nous profitons de chaque minute et faisons tout pour garder le moral. Le cancer, pour beaucoup d’enfants et de familles, c’est un confinement forcé.

Lors de notre dernière visite à Washington, nous avions pu repartir avec les doses de médicaments pour quatre mois en raison de la pandémie qui s’annonçait. Nous venons d’apprendre que le laboratoire peut nous fournir des doses pour deux mois supplémentaires sans nécessairement devoir revenir à Washington. C’est un grand soulagement qui nous permet d’être tranquilles à ce niveau jusque mi-août. Nous nous organisons avec l’équipe de Stockholm pour passer les examens nécessaires. La dernière IRM en date, le 24 avril, montre que la tumeur est stable. Nous n’avons pas plus de détails, mais la situation est stationnaire et l’état général d’Anatole le confirme.

Mai est le mois de sensibilisation aux cancers cérébraux (Go gray in May – brain cancer awareness month). L’occasion nous est donnée de rappeler que le cancer reste la première cause de mortalité par maladie des enfants de moins de 15 ans, et que si 70 % des enfants s’en sortent, avec plus ou moins de séquelles, aucune avancée thérapeutique n’a été faite depuis plus de 50 ans dans les soins de certains cancers comme les tumeurs cérébrales. La fédération Grandir sans cancer se mobilise pour débloquer des fonds et nous la soutenons avec de nombreuses autres associations, mais aussi des médecins, des chercheurs, et les professionnels de la santé.

C’est aussi une période où nous pensons encore plus à tous les enfants partis trop tôt et tous ceux qui se battent depuis des années ou encore depuis tout récemment et à leurs familles. Chaque enfant touché est une famille dont la vie se trouve bouleversée. Une pensée pour Édouard, un petit copain dont nous avions fait la connaissance à Washington et qui vient de rejoindre les rangs bien trop nombreux de ces drôles de guerriers.